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A L’ACADÉMIE DES SCIENCES.


sont aussi peu connues que le mouvement du fluide qui l’entoure et les phénomènes qui se produisent dans son sein. En vain nous avons parcouru la surface de la terre, fouillé dans ses entrailles, décrit, analysé même les substances qu’elle renferme. Les causes qui ont hérissé le globe de montagnes, qui l’ont sillonné de vallées, qui ont creusé les mers, élevé les îles, distribué sur la terre les combinaisons si diverses d’un petit nombre d’éléments ; les lois qui ont présidé à la formation de ces combinaisons, à la fois si constantes et si variées, tous ces objets nous sont inconnus. Nous avons créé des systèmes ; mais à l’instant qu’on a fait un pas de plus sur la surface de la terre, qu’on s’est enfoncé quelques pieds plus avant dans son sein, tous ces fantômes de l’imagination se sont évanouis. Comment un être éphémère surprendra-t-il le secret des opérations que la nature prépare dans des temps si longs pour notre durée ? Comment un homme saisira-t-il un ensemble dont les parties sont répandues comme en désordre sur un espace si vaste, qu’en y consacrant sa vie entière, il lui serait impossible, non pas d’en observer toute l’étendue, mais de la parcourir, non de tout examiner, mais de tout voir ?

Combien l’histoire de l’homme même est-elle encore ignorée ? La terre qu’il habite, sa température, son humidité, son élévation plus ou moins grande, les productions du sol, les travaux de la culture, les différentes espèces d’occupation, la manière de vivre, de se vêtir, les usages, les gouvernements, les lois, toutes ces causes agissent sur la durée de la