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A L'ACADÉMIE FRANÇAISE.


mêmes erreurs qu’elle avait abjurées, les sages s’occupent loin d’elle à enrichir par d’heureuses découvertes le système des connaissances humaines ; la voix de la raison se fait entendre aux hommes éclairés ; elle instruit les enfants dont les pères l’ont méconnue, et elle assure le bonheur de la génération qui n’existe point encore.

Grâce à l’imprimerie, cet art conservateur de la raison humaine, un principe utile au bonheur public a-t-il été découvert, il devient en un instant le patrimoine de toutes les nations. En vain s’obstinerait-on à rejeter une vérité nouvelle, déposée dans les livres : elle survit aux hommes qui l’ont dédaignée, et, dans le temps même où ils la croient anéantie, elle prépare en silence son empire sur les opinions.

Peut-être le progrès nécessaire des sciences physiques aurait-il suffi pour assurer le progrès des sciences morales, et nous préserver du retour de la barbarie.

L’union entre ces deux ordres de connaissances agrandit la sphère des sciences morales, et peut seule y donner aux faits cette exactitude, aux résultats cette précision, qui distinguent les vérités dignes d’entrer dans le système des sciences d’avec les simples aperçus de la raison. Elle rend à la fois les savants plus respectables, en rendant leurs spéculations plus directement utiles ; et les philosophes plus sages, en leur faisant prendre l’habitude de cette marche lente, mais assurée, à laquelle l’étude de la nature est assujettie, en leur apprenant à tout espérer