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ENTRE TURGOT ET CONDORCET.


brochures ne sont que des coups d’épingles, que le colosse de la superstition peut à peine sentir, et qui ne font qu’exciter sa fureur sans lui ôter de ses forces. Votre entrée dans le ministère est un coup de foudre. Le théologien parle des sciences en homme qui a bien lu la préface des bons livres. Je voudrais que tous les littérateurs en fissent autant ; ils perdent par leur ignorance une source de grandes beautés, ou ils s’exposent à dire des choses ridicules.

On dit à Paris que vous réussissez à merveille auprès du roi ; je le désire pour bien des raisons. Je ne voudrais pas que l’arrangement du parlement se fit sans vous.

Qu’il y a de choses à faire pour le bien public ! Proscrire le fanatisme et faire justice des assassins de La Barre ; assigner pour chaque crime une peine légale ; supprimer la question et des supplices barbares, trop éloignés de nos mœurs ; établir enfin un tribunal où le particulier insulté par un magistrat, ou qui aurait un procès avec lui, serait jugé par d’autres que par les confrères de sou adversaire. C’est le défaut d’un pareil tribunal qui avait rendu les anciens parlements si insolents dans leurs capitales, et si haïs dans leurs ressorts.

On m’a dit qu’il était question de disperser les régiments de cavalerie et de dragons dans les villages. C’est une source abondante de corruption et de misère pour les campagnes, et une source d’indiscipline pour les troupes. J’ai peur que l’esprit petit et étroit de cet homme [1] ne nous fasse beaucoup

  1. Maurepas.