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CORRESPONDANCE


cruauté dans l’affaire d’Urbain Grandier, il y a ici plus d’avilissement. L’évêque d’Auxerre n’a d’autre traité à faire avec les honnêtes gens que celui que les Hollandais proposèrent à Louis XIV aux conférences de Gertrudenberg : il faut qu’il chasse lui-même les juges qu’il a protégés et rendus insolents.

Il paraît une Gazette de littérature pour laquelle il vous faudra souscrire à votre retour. Mademoiselle de l’Espinasse a un torticolis qui a succédé à la toux, parce qu’il est apparemment nécessaire qu’elle souffre. M. de Monteynard [1] est toujours en place. J’ai vu sa lettre circulaire. Est-ce que depuis l’éloge des administrateurs de cet été, ils se croient obligés d’en imiter le style ? On a joué hier Eugénie [2] à la Comédie-Française : elle a été reçue comme Tancrède ; on a crié qu'on voulait le Barbier de Séville, pièce du même auteur, interrompue, comme vous savez, par le coup de poing que M. le duc de Chaulnes lui donna l’année passée [3] ; les rieurs sont pour Beau-

  1. Ministre de la guerre.
  2. C’est une reprise d’Eugénie ; la première représentation est de 1767. Bachaumont parle de cette reprise et de ces cris du parterre à la date du 12 février 1774.
  3. Le Barbier de Séville ne fut joué que le 23 février 1775 ; mais depuis plus de deux ans la pièce était célèbre dans le public par les hésitations de la police, qui tour à tour la permettait et la défendait.

    L’affaire de Beaumarchais avec le duc de Chaulnes retarda beaucoup la pièce : le duc de Chaulnes, jaloux de Beaumarchais, qu’il avait lui-même introduit chez sa maîtresse, devait se battre en duel avec son rival préféré. Dans son impatience, il ne put attendre jusque-là, et, dans sa propre maison, il se précipita sur