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ENTRE TURGOT ET CONDORCET.



24. A TURGOT.


Ribemont, ce dimanche 14 juin 1772.


J’ai enfin quitté Paris, Monsieur, aussi las de la vie active que j’y menais que fâché de ne plus voir les gens que j’aime.

Vous êtes bien heureux d’avoir la passion du bien public et de pouvoir la satisfaire ; c’est une grande consolation et d’un ordre supérieur à celle de l’étude. Pour bien finir mon emploi de correspondant, voici un madrigal de l’abbé Arnaud.


De l’inquiet amour je connais les alarmes ;
De la tendre amitié je connais les douceurs :
L’un n’a que des plaisirs fugitifs et trompeurs.
Et sur tous les instants l’autre répand des charmes.
Je le sais ; mais en vous voyant
Je donnerais, belle Sylvie,
Le bonheur de toute la vie
Pour le bonheur d’un seul instant.

Voltaire a envoyé au vieux maréchal une pièce de vers sur les troubles de l’Académie [1] . Je ne l’ai point vue, et je crains de la voir. Que notre vieux maître ne ressemble point au premier général des capucins qui, après avoir enlevé une fille à 70 ans, est mort socinien. On dit cependant qu’à la fin de la pièce il y a un petit morceau de prose ironique en l’honneur de son vieil Alcibiade.

Adieu, Monsieur ; mon encre est blanche comme

  1. Les Cabales (œuvres de Voltaire, t. XIV).