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ENTRE TURGOT ET CONDORCET.


du monde, comme vous l’imaginez bien. On va juger Billard et l’abbé Grizel [1].

Les petites filles de la paroisse Saint-Paul ont fait leur première communion, et on les a régalées ensuite de soupe au lait ; mais en guérissant l’âme on a empoisonné le corps : un très-grand nombre s’est trouvé fort mal ; malheureusement personne n’est mort, car, étant en état de grâce, elles seraient devenues des anges, état bien au-dessus de celui d’une fille, quelque jolie qu’elle puisse être. On soupçonne le vert-de-gris de s’être mêlé au pain des anges, et d’avoir envié à la farine ce privilège exclusif de devenir Dieu.

Adieu, Monsieur, je vais partir ; mademoiselle de l’Espinasse va perdre son second secrétaire, mais le meilleur lui reste [2], et je regretterai beaucoup de n’être plus chargé de ses commissions pour vous, de perdre les occasions d’entretenir un commerce si agréable pour moi. Daignez me conserver la même amitié, et comptez sur toute la mienne.

  1. Ce cher monsieur Billard et son ami Grizel,
    Grands porteurs de cilice et diseurs de missel,

    avaient fait banqueroute de compagnie : le premier était caissier général des postes ; il fut condamné au pilori et au bannissement ; l’autre était jésuite et directeur de dévotes illustres : il avait converti Mme d’Egmont, et lui avait ensuite volé cinquante mille francs. On le mit en liberté, et il revint chanter une messe d’actions de grâces à Notre-Dame, où il était sous-pénitencier. Voltaire l’a mis dans l’enfer de la Pucelle, dans l'Épître au roi de la Chine, et dans l'Épître à Horace.

  2. D’Alembert.