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CORRESPONDANCE


vieux barbouilleur, qui vous est tendrement attaché, à vous et à vos amis.


86. A VOLTAIRE.


Ce 19 janvier 1778.


Mon cher et illustre maître, vous êtes trop bon d’attacher quelque prix à mes réflexions [1] ; c’est l’amitié qui me les a inspirées. M. Suard, qui a lu la pièce comme censeur des spectacles, M. Turgot, à qui on a cru pouvoir la laisser lire sans vous déplaire, pensent à peu près comme moi. Nous trouvons également que si vous daignez faire quelques corrections et vous rendre sévère à vous-même, il ne vous faudra qu’un peu de temps et de patience pour produire deux ouvrages [2] qui feront époque dans la littérature. Je ne suis point surpris de l’effet que la lecture des deux pièces a faite à Ferney ; j’y ai trouvé de quoi justifier l’enthousiasme et les larmes. Mais songez que vous nous avez accoutumés à la perfection dans les convenances, dans les caractères, comme Racine nous avait accoutumés à la perfection dans le style ; que vous seul avez réuni ces deux perfections, et que si on est sévère, c’est votre faute. M. d’Argental fera ce que vous souhaitez. J’ai reçu votre nouveau factum en faveur du genre humain [3]. J’en avais déjà un exemplaire

  1. Sur la tragédie d'Irène.
  2. Irène et Agathocle.
  3. Le prix de la justice et de l'humanité, t. L des œuvres de Voltaire.