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CORRESPONDANCE


sibilité de payer sans faire des manœuvres malhonnêtes, le forçât à s’en aller.

M. Turgot fut averti de l’affaire de M. Amelot : il en parla avec force ; il écrivit au roi ; il lui montra de nouveau la nécessité d’une réforme que M. Amelot ne ferait pas ; que la ruine de la nation et de la gloire du roi serait la suite de celle nomination ; que le garde des sceaux avait par ses intrigues ameuté les parlements contre l’autorité ; qu’on cherchait de toutes parts à augmenter les difficultés de faire le bien. Le roi eut la faiblesse de montrer cette lettre à M. de Maurepas. Il n’y avait plus à reculer. Il revint à ses anciennes inculpations contre M. Turgot ; il fit dire par M. d’Ogni [1], qui ouvre les lettres à la poste, que le mécontentement était général en France, et avait M. Turgot seul pour objet. Ce d’Ogni était l’ennemi personnel de M. Turgot, qui l’avait traité avec le mépris que mérite l’infamie du métier qu’il fait. D’ailleurs il sentait que, si jamais M. Turgot devenait ministre prépondérant, cet odieux espionnage serait détruit.

M. Turgot était décidé à la retraite, et il ne voulait que parler au roi encore une fois : il alla chez lui le samedi, mais le roi était à la chasse ; il y retourna, mais le roi était au débotté, et il fallait l’attendre. M. Turgot remit au travail du lendemain ; mais M. de Maurepas, qui avait craint cette entrevue, fit entendre que l’on ne devait pas attendre la démission de M. Turgot, qu’il ne fallait pas laisser dire qu’il s’en allait pour n’avoir pu faire le bien, mais annoncer

  1. Voyez la note p. 115.