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CORRESPONDANCE


tendre que le maître de ce jeune homme lui fasse un sort digne de tous deux, et s’il ne le fait pas, on y suppléera autant qu’un particulier peut suppléer à ce que doit faire un grand prince.

Mais surtout je vous conjure, au nom de l’amitié que vous m’avez toujours témoignée, de ne plus souffrir qu’on m’impute des choses que je ne puis avoir faites [1], et qui, en me perdants ans ressources, me mettraient hors d’état d’être utile à cet infortuné dont vous prenez le parti avec tant de grandeur d’âme. Vous me flattez d’un côté, mais vous me percez de l’autre ; ma situation est plus affreuse que vous ne pensez.

Je vous envoie quelques exemplaires de l’ouvrage que vous m’avez confié [2]. Je me donnerai bien de garde d’en envoyer à M. de Trudaine. Je vous ai servi et je vous servirai toujours ; mais je ne veux pas passer pour être l’auteur d’un écrit auquel je n’ai nulle part, et dont je me sens d’ailleurs très-incapable. Je vous aime autant que je vous estime. Je vous suis solidement attaché ; mais dans les circonstances délicates et fatales où je me trouve depuis si longtemps, épargnez-moi, je vous en conjure.

V.


42. A CONDORCET.


7 juillet 1775.


Sachez d’abord, mon respectable et cher philo-

  1. Comme l’épître du chevalier de Morton.
  2. Réflexions sur le commerce des blés, que Voltaire s’était chargé de faire imprimer. Voyez les lettres nos 37 et 40.