Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 1.djvu/250

Cette page n’a pas encore été corrigée
48
CORRESPONDANCE


J’aimerais mieux mourir que de compromettre en rien l’ange tutélaire qui veut bien vous faire parvenir cette lettre [1]. Ce serait, à mon avis, trahir la France, que de laisser échapper la moindre indiscrétion sur le compte d’un homme unique qui lui est si nécessaire. Enfin Raton, qui n’a plus de pal tes, met tout entre les mains des Bertrands.

Mais encore un petit mot, je vous prie, sur cette étrange affaire. On présenterait requête au conseil pour casser l’arrêt du parlement contre La Barre, ou pour faire rejuger son procès par le parlement même. Proposer au conseil de casser l’arrêt du parlement au moment qu’il est rétabli, serait une démarche qui paraîtrait bien téméraire. Demander que ce même parlement rejugeât le procès serait encore plus infructueux : il ne cassera pas lui-même son arrêt.

Resterait donc à demander des lettres du sceau pour purger la contumace de d’ÉtalIonde, et surtout pour la purger au parlement de Paris, car il ne veut point paraître devant les polissons ignorants et fanatiques d’Abbeville. En ce cas, il faudrait savoir si le parlement peut tirer à lui ce procès et l’ôter à la juridiction inférieure de plein droit, ou si l’on aurait besoin de lettres d’attributions.

    « Pendant douze années que Voltaire survécut à cette injustice, il ne perdit point de vue l’espérance d’en obtenir la réparation ; mais il ne put avoir la consolation de réussir : la crainte de blesser le parlement de Paris l’emporta toujours sur l'amour de la justice. » Voyez, dans la Correspondance gênéraie, la lettrede Condorcet à Target.

  1. Turgot, ministre des finances, sous le couvert de qui Voltaire écrivait.