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ENTRE VOLTAIRE ET CONDORCET.


20. A VOLTAIRE.


Ce dimanche, 1774.


Bertrand n’a fait part qu’à moi des marrons que Raton lui a envoyés. Il faut que Raton vienne à notre secours contre le tonnerre et contre les moines, qui font beaucoup plus de mal et d’une manière moins noble [1]. Les amis des jésuites ont déjà changé de projets trois ou quatre fois :

Et qui change aisément est faible ou veut tromper !

Il faut donc vous en défier ; qu’il y ait une congré-

  1. Il s’agit toujours de cette congrégation, mentionnée ci-dessus dans la lettre n°18, et destinée à renverser l’Université et à s’emparer de l’instruction publique. Ce n’est pas d’aujourd’hui, comme l’on voit, que le clergé nourrit ce projet et s’évertue pour arriver à le faire réussir. Le retour des mêmes circonstances précisément nous engage à citer ici un fragment d’unelettre où D’Alembert trace à Voltaire le plan des jésuites :

    « Voici le projet de la nouvelle forme qu’on prétend leur donner. Ils formeront une communauté de prêtres qui n’aura point de général à Rome, mais qui fera des vœux, excepté celui de pauvreté, afin qu’ils soient susceptibles de bénéfices. On recevra « dans cette communauté d’autres prêtres que les ex-jésuites, et même ces prêtres seuls auront l’administration des biens. De plus, l’étude de la théologie sera interdite dans cette congrégation, et ils ne pourront jamais diriger les séminaires ; mais ils serviront de pépinière pour donner des maîtres aux collèges de province, sans néanmoins être membres de l’Université.

    « Vous sentez, mon cher maître, tout ce qu’il y a d’insidieux dans ce projet, et que, dés qu’une fois la canaille sera établie,