dont il était l’objet, lorsque, par hasard ou
par calcul, il se montra contrarié d’avoir oublié
sa tabatière. Madame Vernet, toujours
bonne, toujours empressée se leva et monta
l’escalier pour aller la chercher. Condorcet
saisit ce moment et s’élança dans la rue. Les cris
déchirants de la portière avertirent aussitôt madame
Vernet qu’elle venait de perdre le fruit
de neuf mois d’un dévouement sans exemple.
La pauvre femme tomba évanouie.
Tout entier au besoin d’éviter une poursuite qui aurait perdu sa bienfaitrice, Condorcet parcourut la rue Servandoni avec beaucoup de vitesse. En s’arrêtant pour prendre haleine au détour de la rue de Vaugirard, il vit à ses côtés M. Sarret, le cousin de madame Vernet. Le proscrit avait à peine eu le temps de laisser échapper quelques paroles où l’admiration se mêlait à la sensibilité, à la reconnaissance, que M. Sarret lui disait avec cette fermeté qui n’admet point de réplique : « Le costume que vous portez ne vous déguise pas suffisamment ; vous connaissez à peine votre chemin ; seul, vous ne réussiriez jamais à tromper l’active surveillance des argus que la Commune entretient à toutes