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permettent à un négociant de vendre dix pour cent de plus les marchandises qu’il avance pour un an. On voit que la contradiction est moins palpable.

Nos législateurs, s’il est possible, raisonnent encore plus mal que les casuistes. Ils condamnent le prêt à intérêt, et ils le tolèrent. Ils le condamnent sans savoir pourquoi, et ils le tolèrent parce qu’ils y sont forcés. Leurs lois, effet de l’ignorance et des préjugés, sont inutiles, si on ne les observe pas ; et, si on les observe, elles nuisent au commerce.

L’erreur où tombent les casuistes et les législateurs vient uniquement des idées confuses qu’ils se sont faites. En effet, ils ne blâment pas le change, et ils blâment le prêt à intérêt. Mais pourquoi l’argent auroit-il un prix dans l’un, et n’en auroit-il pas dans l’autre ? Le prêt et l’emprunt sont-ils autre chose qu’un change ? Si, dans le change, on échange des sommes qui sont à distance