Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 2.djvu/89

Cette page n’a pas encore été corrigée

geste équivaut souvent à une longue phrase. Par la même raison, les langues faites sur le modèle de ce langage doivent être les plus vives ; & les autres doivent perdre de leur vivacité, à proportion que, s’éloignant davantage de ce modèle, elles en conservent moins le caractère. Or, ce que j’ai dit sur la prosodie fait voir que, par cet endroit, la langue gréque se ressentoit plus qu’aucune autre des influences du langage d’action ; & ce que je dirai sur les inversions prouvera que ce n’étoit pas-là les seuls effets de cette influence. Cette langue étoit donc très-propre à exercer l’imagination. La nôtre, au contraire, est si simple dans sa construction & dans sa prosodie, qu’elle ne demande presque que l’exercice de la mémoire. Nous nous contentons, quand nous parlons des choses, d’en rappeller les signes ; & nous en réveillons rarement les idées. Ainsi l’imagination moins souvent remuée devient naturellement plus difficile à émouvoir. Nous devons