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me paroît curieuse, & propre à confirmer mes conjectures.

§. 51. Je viens de dire, d’après tous ceux qui ont écrit sur cette matière, que les grecs avoient l’imagination plus vive que nous. Mais je ne sçais si la vraie raison de cette différence est connue ; il me semble, au moins qu’on a tort de l’attribuer uniquement au climat. En supposant que celui de la Grece se fût toujours conservé tel qu’il étoit, l’imagination de ses habitans devoit peu à peu s’affoiblir. On va voir que c’est un effet naturel des changemens qui arrivent au langage.

J’ai remarqué ailleurs[1] que l’imagination agit bien plus vivement dans des hommes qui n’ont point encore l’usage des signes d’institution : par conséquent, le langage d’action étant immédiatement l’ouvrage de cette imagination, il doit avoir plus de feu. En effet, pour ceux à qui il est familier, un seul

  1. Prem. Part. p. 200. §. 21.