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plus ils sont secs, rebutans et difficiles à entendre : c’est parce qu’ils n’ont pas su choisir celui qui est le plus naturel à la matière qu’ils traitent. S’ils l’eussent choisi, ils auroient exposé leurs pensées d’une manière si claire et si simple, que le lecteur les eut comprises trop facilement, pour se douter des efforts qu’ils auroient été obligés de faire. Nous sommes portés à croire les choses faciles ou difficiles pour les autres, selon qu’elles sont l’un ou l’autre à notre égard ; et nous jugeons naturellement de la peine qu’un écrivain a eue à s’exprimer, par celle que nous avons à l’entendre.

§. 47. L’ordre naturel à la chose ne peut jamais nuire. Il en faut jusques dans les ouvrages qui sont faits dans l’enthousiasme, dans une ode, par exemple : non qu’on y doive raisonner méthodiquement, mais il faut se conformer à l’ordre dans lequel s’arrangent les idées qui caractérisent chaque passion. Voilà, ce me semble, en quoi consiste toute