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pas encore possible de faire des raisonnemens. Ceux qui vouloient, par exemple, prouver combien il est avantageux d’obéir aux loix, ou de suivre les conseils des personnes plus expérimentées, n’avoient rien de plus simple que d’imaginer des faits circonstanciés : l’évenement qu’ils rendoient contraire ou favorable selon leurs vûes, avoit le double avantage d’éclairer & de persuader. Voilà l’origine de l’apologue ou de la fable. On voit que son premier objet fut l’instruction, & que, par conséquent, les sujets en furent empruntés des choses les plus familières, & dont l’analogie étoit plus sensible ; ce fut d’abord parmi les hommes, ensuite parmi les bêtes, bientôt après parmi les plantes. Enfin l’esprit de subtilité, qui de tout temps a eu ses partisans, engagea à puiser dans les sources les plus éloignées. On étudia les propriétés les plus singulières des êtres, pour en tirer des allusions fines & délicates, de sorte que la fable fut par dégrés changée en parabole, &