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notre pensée, aussitôt que nous les prononçons ; comme si les idées ne pouvoient qu’être les mêmes dans celui qui parle & dans celui qui écoute. Au lieu de remédier à ces abus, les philosophes ont eux-mêmes affecté d’être obscurs. Chaque secte a été intéressée à imaginer des termes ambigus, ou vuides de sens. C’est par-là qu’on a cherché à cacher les endroits foibles de tant de systêmes frivoles ou ridicules ; & l’adresse à y réussir a passé, comme Locke le remarque[1], pour pénétration d’esprit & pour véritable sçavoir. Enfin il est venu des hommes qui, composant leur langage du jargon de toutes les sectes, ont soutenu le pour & le contre sur toutes sortes de matières : talent qu’on a admiré, & qu’on admire peut-être encore ; mais qu’on traiteroit avec un souverain mépris, si l’on apprécioit mieux les choses. Pour prévenir tous ces abus, voici quelle doit être la signification précise des mots.

  1. L. III. Ch. X.