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dans l’origine des langues, étant peu propres à réfléchir sur eux-mêmes, ou n’ayant, pour exprimer ce qu’ils y pouvoient remarquer, que des signes jusques-là appliqués à des choses toutes différentes ; on peut juger des obstacles qu’ils eurent à surmonter, avant de donner des noms à certaines opérations de l’ame. Les particules, par exemple, qui lient les différentes parties du discours, ne dûrent être imaginées que fort tard. Elles expriment la manière dont les objets nous affectent, & les jugemens que nous en portons, avec une finesse qui échappa longtemps à la grossiéreté des esprits ; ce qui rendit les hommes incapables de raisonnement. Raisonner, c’est exprimer les rapports qui sont entre différentes propositions ; or il est évident qu’il n’y a que les conjonctions qui en fournissent les moyens. Le langage d’action ne pouvoit que foiblement suppléer au défaut de ces particules ; & l’on ne fut en état d’exprimer avec des noms les rapports dont elles sont