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pour le second, parce qu’en fixant son attention à l’objet dont on vouloit l’entretenir, elle le préparoit à comprendre plus aisément un terme moins usité, & dont la signification ne devoit pas être si sensible. Ainsi l’ordre le plus naturel des idées vouloit qu’on mît le régime avant le verbe : on disoit, par exemple, fruit vouloir.

Cela peut encore se confirmer par une réflexion bien simple. C’est que, le langage d’action ayant seul pu servir de modèle à celui des sons articulés, ce dernier a dû, dans les commencemens, conserver les idées dans le même ordre que l’usage du premier avoit rendu le plus naturel. Or on ne pouvoit, avec le langage d’action, faire connoître l’état de son ame, qu’en montrant l’objet auquel il se rapportoit. Les mouvemens qui exprimoient un besoin, n’étoient entendus qu’autant qu’on avoit indiqué, par quelque geste, ce qui étoit propre à le soulager. S’ils précédoient, c’étoit à pure perte, & l’on étoit obligé de les répéter ;