Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 2.djvu/131

Cette page n’a pas encore été corrigée

donc longtemps à n’avoir d’autre moyen pour rendre ces idées, je vois, j’entends, je veux, j’aime & autres semblables, que de prononcer le nom des choses d’un ton particulier, & de marquer à peu près, par quelque action, la situation où l’on se trouvoit. C’est ainsi que les enfans, qui n’apprennent ces mots que quand ils sçavent déjà nommer les objets qui ont le plus de rapport à eux, font connoître ce qui se passe dans leur ame.

§. 83. En se faisant une habitude de se communiquer ces sortes d’idées par des actions, les hommes s’accoutumèrent à les déterminer ; & dès-lors ils commencèrent à trouver plus de facilité à les attacher à d’autres signes. Les noms qu’ils choisirent pour cet effet, sont ceux qu’on appella verbes. Ainsi les premiers verbes n’ont été imaginés que pour exprimer l’état de l’ame, quand elle agit ou pâtit. Sur ce modèle, on en fit ensuite pour exprimer celui de chaque chose. Ils eurent cela de commun avec les adjectifs, qu’ils désignoient