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pas faite pour nous donner l’idée de la distance, & même, en y joignant le secours de l’expérience, l’idée qu’elle en fournit, est encore la plus imparfaite de toutes. Il y a des occasions où il en est à peu près de même de la vûe. Si je regarde par un trou un objet éloigné, sans appercevoir ceux qui m’en séparent, je n’en connois la distance que fort imparfaitement. Alors je me rappelle les connoissances que je dois à l’expérience, & je juge cet objet plus ou moins loin, selon qu’il me paroît plus ou moins au-dessous de sa grandeur ordinaire. Voilà donc un cas où il est nécessaire de joindre un jugement au sens de la vûe comme à celui de l’ouïe : mais remarquez bien qu’on en a conscience, & qu’après, comme auparavant, nous ne connoissons les distances, que d’une maniere fort imparfaite.

J’ouvre ma fenêtre, & j’apperçois un homme à l’extrémité de la ruë : je vois qu’il est loin de moi, avant que j’aye encore formé aucun