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le silence, & il déclara qu’il parloit, quoique ce ne fut encore, qu’imparfaitement. Aussitôt des théologiens habiles l’interrogèrent sur son état passé, & leurs principales questions roulèrent sur Dieu, sur l’ame, sur la bonté ou la malice morale des actions. Il ne parut pas avoir poussé ses pensées jusques-là. Quoiqu’il fût né de parens catholiques, qu’il assistât a la messe, qu’il fût instruit à faire le signe de la croix & à se mettre à genoux dans la contenance d’un homme qui prie ; il n’avoit jamais joint à tout cela aucune intention, ni compris celle que les autres y joignent. II ne sçavoit pas bien distinctement ce que c’étoit que la mort, & il n’y pensoit jamais. Il menoit une vie purement animale, tout occupés des objets sensibles & présens, & du peu d’idées qu’il recevoit par les yeux. Il ne tiroit pas même de la comparaison de ses idées tout ce qu’il semble qu’il en auroit pu tirer. Ce n’est pas qu’il n’eût naturellement