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Horace de Corneille : il n’en est pas de même pour se mettre à la place de l’homme que j’ai imaginé. Voyons encore un exemple.

Si Moïse ayant à parler de la création de la lumière, avoit été moins pénétré de la grandeur de Dieu, il se seroit étendu davantage à montrer la puissance de cet être suprême. D’un côté il n’auroit rien négligé pour exalter l’excellence de la lumière ; & de l’autre, il auroit représenté les ténèbres comme un chaos où toute la nature étoit ensevelie. Mais, pour entrer dans ces détails, il étoit trop rempli des sentimens que peut produire la vue de la supériorité du premier être, & la dépendance des créatures. Ainsi les idées de commandement & d’obéissance étant liées à celles de supériorité & de dépendance, elles n’ont pu manquer de se réveiller dans son ame ; & il a dû s’y arrêter, comme étant suffisantes pour exprimer toutes les autres. Il se borne donc à dire : Dieu dit que la lumière soit, & la lumière fut. Par le nombre & par la beauté des idées