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disposons de nos perceptions, à peu près comme si nous avions le pouvoir de les produire & de les anéantir. Que parmi celles que j’éprouve actuellement, j’en choisisse une ; aussitôt la conscience en est si vive & celle des autres si foible, qu’il me paroîtra qu’elle est la seule dont j’aie pris connoissance. Qu’un instant après je veuille l’abandonner, pour m’occuper principalement d’une de celles qui m’affectoient le plus légèrement ; elle me paroîtra rentrer dans le néant, tandis qu’une autre m’en paroîtra sortir. La conscience de la première, pour parler moins figurément, deviendra si foible, & celle de la seconde si vive, qu’il me semblera que je ne les ai éprouvées que l’une après l’autre. On peut faire cette expérience, en considérant un objet fort composé. Il n’est pas douteux qu’on n’ait, en même temps, conscience de toutes les perceptions que ses différentes parties, disposées pour agir sur les sens, font naître. Mais on diroit que la réflexion suspend,