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d’amour-propre, au contraire, et ce qui est vrai de si grands personnages, l’est à plus forte raison de tous les Allemands ; il serait difficile d’en trouver qui viendraient dire : « Je puis parler français comme M. Clemenceau, mais, par amour-propre national, je m’abstiens de le faire ».

Ce qui est vrai des Allemands l’est également des Anglais. Je visitais, il y a quelques années l’Université de Cambridge ; on me conseilla, si je voulais faire preuve de courtoisie, d’adresser d’abord la parole en français aux professeurs anglais auxquels je serais présenté ; les Anglais qui possèdent le français à fond, en tirent grandes satisfactions d’amour-propre, même parmi leurs propres compatriotes.

On voit donc que les amours-propres nationaux travaillent pour le français et non contre lui ; et ils travailleront pour lui avec une force d’autant plus grande qu’il deviendra plus universel.

Assurément si le français était imposé par quelque autorité politique, le sentiment national se réveillerait, indomptable, contre sa domination ; mais il n’y aura rien de pareil, les langues auxiliaires et supra-nationales se forment partout et toujours spontanément et naturellement ; l’idiome qui réunit le plus d’avantages s’étend de lui-même dans un canton, dans une province, dans un pays et enfin entre différents pays. Le même mouvement s’accomplit sur une échelle de plus en plus vaste en vertu de la loi de la répé-