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marguerite bourgeoys

gée par les motifs les plus purs, s’y montrât d’abord peu favorable. Jusqu’alors, on avait vu les vierges consacrées à Dieu, suivre quelqu’une des règles approuvées par l’Église, et demeurer renfermées dans la clôture de leurs couvents. »

Le genre de vie des filles de la Congrégation était jugé trop extraordinaire, on ne croyait pas qu’il fût possible de le continuer.

La Sœur Bourgeoys n’en continuait pas moins sa mission chez nous. Dès les premières années, elle avait ouvert un pensionnat pour les élèves aisées ; elle établit à la Montagne une école pour les petites sauvagesses ; à Montréal et à Québec on avait l’ouvroir de la Providence où vingt grandes filles pauvres apprenaient à travailler.

Pour la Sœur Bourgeoys vivre c’était agir. Elle était l’un de ces êtres de grâce, de courage et d’abnégation que rien ne lasse, à qui les fardeaux les plus lourds semblent donner des ailes.

On ne saurait trop louer sa délicate charité envers les jeunes filles qui venaient de France pour s’établir dans la colonie et qu’on appelait filles du roi. À chacun de ses voyages, on lui en confia un bon nombre. Durant la traversée, elle voyait à tous leurs besoins avec une sollicitude infatigable ; à Montréal, elle les logeait, les nourrissait, les instruisait, les préparait à la rude vie qui les attendait. Elle avait accommodé une maison pour les recevoir et y restait avec elles jusqu’à leur mariage. Celles qui arrivaient, elle allait les quérir au bord de l’eau et l’on s’imagine facilement