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marguerite bourgeoys

Elle savait par expérience, quelles privations, quelles souffrances l’extrême pauvreté entraîne. Mais l’esprit de Jésus-Christ la possédait parfaitement et la souffrance faisait sa vie et ses délices.

Cependant cette passionnée de la croix n’avait rien d’austère dans son extérieur. Au contraire, tout en elle conviait au divin Maître, et nulle part l’héroïque créature ne semblait plus à sa place qu’au milieu des sourires et des clartés radieuses de l’enfance.

L’étable ne tarda pas à être insuffisante : il fallut construire une maison, et les Sœurs eurent bientôt des missions à Montréal et ailleurs.

L’instruction était absolument gratuite, ce qui obligeait les Sœurs à subsister du travail de leurs mains. Il est impossible de se faire une idée de ce que ces généreuses femmes eurent à dévorer de privations et de fatigues. « Elles travaillaient jour et nuit », dit l’annaliste de l’Hôtel-Dieu.

Comme le remarque M. de Ransonet, la Sœur Bourgeoys n’attendait pas que les paroisses qui s’ouvraient fussent en état d’assurer à ses filles la subsistance. Il lui suffisait qu’il y eût du bien à faire.


« On nous demande, a écrit la Sœur Bourgeoys, pourquoi nous faisons des missions qui nous mettent en hasard de beaucoup souffrir, et même d’être prises, tuées, brûlées par les sauvages.

« Nous répondons que les apôtres sont allés dans tous les quartiers du monde pour prêcher Jésus-Christ, et qu’à leur exemple, nous sommes pressées d’aller le faire connaître dans tous les lieux de ce pays où nous sommes envoyées. Si les apôtres ont donné leurs travaux, leur vie et tout ce qu’ils pouvaient prétendre en ce monde pour faire connaître Dieu, pourquoi les filles de la Congrégation ne sacrifieraient-elles