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marguerite bourgeoys

le constata avec regret et le fondateur de Montréal chargea Marguerite de la faire remplacer.

Elle ne craignit pas d’accompagner les ouvriers trois jours de suite. Qui nous dira ses pensées pendant qu’elle suivait leur travail, et quels profonds hommages elle rendit à la croix rédemptrice lorsqu’on l’éleva sur le Mont-Royal ? Qu’elle aurait aimé s’y rendre souvent en pèlerinage ! Mais le danger était trop grand.

C’était pour assurer l’instruction aux enfants de Montréal que Maisonneuve lui avait demandé de se sacrifier à son œuvre. En attendant qu’on pût ouvrir une école, il confia à Marguerite Bourgeoys la direction de sa maison et elle passa quatre ans au fort. D’après les historiens, elle fut comme une véritable mère pour les colons ; on la trouvait partout où il y avait quelque souffrance à soulager. Les soldats lui inspiraient une compassion particulière ; elle blanchissait leur linge, raccommodait leurs hardes. Durant un hiver très rude, quelques-uns étant venus se plaindre que le froid les empêchait de dormir, elle leur donna le lit qu’on l’avait forcée d’accepter et se réduisit à coucher sur le plancher.

Combien elle devait s’ingénier pour soulager un peu ceux qui passaient les nuits d’hiver, le long du fleuve, veillant en silence pour le salut de tous ! Comme son cœur si noble devait s’attendrir quand les braves qui étaient de garde, venaient à la chapelle du fort, faire leur prière à la Vierge, avant de prendre leur poste de périls !