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silhouettes canadiennes

La petite maison de Madame de la Peltrie, à cent pas du monastère, n’avait pas été détruite par le feu. Trois semaines après le désastre, les Ursulines s’y réfugièrent. C’est là que la Mère Saint-Joseph allait passer les quinze derniers mois de sa vie et boire la lente et horrible lie de son calice de souffrances et de pauvreté.

La maison n’avait que trente pieds sur vingt. Un local si exigu ne permettant pas d’avoir des cellules, il fallut revenir aux expédients du couvent de la Basse-Ville. On cloua des planches le long des murs et les lits des religieuses s’alignèrent à double rang. Le reste de l’installation fut à l’avenant ; mais les Ursulines ne tardèrent pas à reprendre leurs néophytes, et malgré la fièvre et les maux qui la dévoraient, la Mère Saint-Joseph continua de se dévouer à leur instruction.

C’est seulement le 2 février 1652 que, vaincue par la douleur, elle prit le lit. Ce lit, fait d’un matelas placé sur deux planches, elle ne le devait plus quitter et la souffrance sous toutes ses formes allait y consommer son union avec le Crucifié.

« Outre les douleurs et les fatigues de sa maladie, dit Marie de l’Incarnation, elle recevait de très grandes incommodités du lieu où nous étions logées. Il était fort petit… le bruit des sandales de bois sur un plancher de bois, les clameurs des enfants, les allées et venues de tout le monde, le bruit de la cuisine dont nous n’étions séparées que par de simples planches, l’odeur de l’anguille qui infectait tout, de sorte que, durant la rigueur du froid, il fallait tenir les fenêtres ouvertes, pour purifier l’air ; la fumée de la chemi-