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silhouettes canadiennes

tons que la petite vérole éclata parmi les sauvages et transforma bientôt le petit séminaire en hôpital. Toutes les néophytes eurent la terrible maladie, et quatre en moururent. Les lits étaient sur le plancher et en si grand nombre qu’il fallait passer incessamment par dessus les malades. Quand la maladie cessa, il ne restait plus de linge aux Ursulines. Non seulement leurs draps et leurs serviettes, mais leurs guimpes et leurs bandeaux avaient été employés à panser les malades, chez qui la petite vérole produisait d’inguérissables ulcères.

Il est impossible de se faire une idée de ce que les Ursulines eurent à souffrir durant ce premier hiver au Canada ; mais « dans les flammes ardentes du sacrifice une paix, une fraîcheur délicieuses sont cachées[1] », et, au dire du P. Lejeune, le pauvre petit couvent de la Basse-Ville renfermait plus de joie que tous les palais.

L’arrivée des religieuses — des vierges qui n’avaient d’autre époux que le grand Esprit — avait fait sensation parmi les indigènes. Beaucoup venaient les visiter. Il y en avait que la grille agaçait. Ils demandaient aux religieuses pourquoi on ne les voyait que par des trous, pourquoi elles avaient la tête enveloppée, etc. Mais, d’après Marie de l’Incarnation, certains capitaines faisaient leurs visites avec autant de politesse que les Français bien nés.

  1. Marie Gyertz.