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pagnes reculées. » Si l’on ajoute que cette population si remarquable pour son urbanité, l’était encore plus par sa foi religieuse, son patriotisme, sa moralité, son courage il faut bien convenir que jamais femmes n’ont mieux compris, mieux rempli leur rôle que les femmes de la Nouvelle-France. Car, comme l’a écrit le regretté M. Rameau, — le premier Français qui se soit sérieusement occupé de nous, — à l’époque de la conquête, il y avait sur les bords du Saint-Laurent « un peuple d’élite auquel rien n’a manqué que la fortune et le concours de la mère-patrie. »

Le général Murray, qui avait vu les Canadiens sur les champs de bataille, leur témoigna toujours un grand respect. Accusé de les favoriser, il répondit : « Je me glorifie d’avoir fait tout en mon pouvoir pour gagner à mon royal maître l’affection de ce brave et généreux peuple. » C’est dans l’église des Ursulines que Montcalm fut inhumé après la bataille des Plaines. « Notre église, dont le toit et le plancher avaient été en plusieurs endroits traversés par des boulets, se trouvait cependant la seule en état d’abriter un peu convenablement les restes du héros, » dit l’Histoire des Ursulines. « Ce fut le soir même du 14, vers les neuf heures, que se fit la cérémonie funèbre ; les ténèbres et le silence planaient tristement sur les ruines de la cité, pendant que défilaient du château Saint-Louis aux Ursulines, le lugubre cortège, composé du clergé, des officiers civils et militaires auxquels se joignirent, chemin faisant, les hommes, les femmes et les enfants qui erraient çà et là au milieu des décombres. Les cloches restèrent muettes, le canon ne résonna point et les clairons furent sans adieu pour le plus vaillant des soldats. Mais quelle scène à l’intérieur de la chapelle ! Les sanglots comprimés jusque-là éclatèrent. » Il semblait, qu’avec la dépouille du grand vaincu on ensevelissait tout l’avenir et la vie même de la patrie.