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l’abbé de calonne

le monde qui le recherchait. Cependant vers l’âge de trente ans, il jeta la toge et prit la soutane.

L’étonnante évolution ne pouvait être suspecte. Mais l’esprit mordant de M. de Calonne déconcerta ses supérieurs ; sa force violente, impétueuse, les inquiétait, et Mgr  de Ronnegaise écrivit au président qu’il doutait fort de la vocation de son fils. On semblait lui trouver l’âme la moins ecclésiastique de la terre, comme disait de lui-même le cardinal de Retz.

Alexandre, l’aîné de la famille de Calonne, plus tard ministre de Louis XVI, n’avait pas meilleure opinion de la vocation de son frère. Mais le président fut plus clairvoyant.

C’était un homme d’une sagesse élevée, d’une grande expérience. Profondément religieux et désabusé des vanités du monde, il avait vu avec joie la résolution de son fils. C’est lui probablement qui le décida d’entrer au Séminaire de Saint-Sulpice[1], et dans cette maison sainte, Ladislas de Calonne travailla sérieusement à conquérir son âme pleine de feu, de larmes et d’orages, et toute sa vie, il bénit Dieu de la formation sacerdotale qu’il y avait reçue.

Aussitôt après son ordination, il fut appelé à Cambrai, capitale de la province, par Mgr  de Choiseul qui le nomma vicaire général et official[2] de son église.

  1. À la fin d’une carrière remplie et comblée dans sa mesure, le président de Calonne déclarait que le bien qu’il avait fait aux malheureux avait été la plus douce joie de sa vie.
  2. Avant la Révolution, on donnait le nom d’Officialité à des tribunaux ecclésiastiques qui connaissaient de toutes les fautes relatives à la foi, à la morale, au culte et à la discipline ainsi que des délits et des abus de pouvoir commis en matière religieuse et les jugements avaient en certains cas des effets civils. Les officialités siégeaient avec tout l’appareil d’un tribunal public. Les fonctions de juge étaient remplies par un official qui constituait à lui seul le tribunal.