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pierre boucher

Iroquois, mais leurs alliés, les Anglais, ne cessaient de les aiguillonner, et en 1691, au temps des semailles, ils reprirent leurs courses dans le haut de la colonie.

Toute tentative de culture entraînait danger de mort et la disette qui se faisait sentir depuis la guerre devint extrême. « L’été de 1691, dit un mémoire du temps, le pain fut rare et cher, quoique l’on eût fait venir de France quantité de farine que l’on envoyait en barque de Québec à Montréal : et pendant l’été, le vent fut si peu fréquent que les barques demeuraient un mois et six semaines en chemin, ce qui obligeait d’envoyer de gros convois au-devant. »

C’était donc en ramant que les colons bien armés allaient quérir la farine qui manquait au foyer. Il est difficile aujourd’hui de se faire une idée des souffrances de leur vie d’alarmes et de misères.

« L’argent avait disparu, dit Garneau, et il fallut émettre une monnaie de carte. Les denrées et les marchandises n’avaient plus de prix. Les munitions de guerre manquaient et l’intendant fut obligé de faire fondre les gouttières des maisons et les poids de plomb pour faire des balles. »

Alors, les balles étaient chose aussi nécessaire que le pain. Le pays presque tout en forêt était ouvert aux ennemis. Il fallait se tenir retranché et n’aller aux champs qu’armé et par troupes.

Une flotte anglaise se préparait à renouveler l’attaque contre Québec. La France envoya une escadre au Cap Breton pour l’arrêter et laissa aux colons la rude tâche de se défendre contre les Iroquois.

Frontenac les protégeait tant qu’il pouvait. Il avait organisé des corps volants chargés de prévenir les surprises. Mais les bandes infernales semblaient sortir du sol. Dans presque toutes les campagnes de Montréal, il y eut des rencontres sanglantes.