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pierre boucher

Denonville aurait pu mettre les cinq nations hors d’état de nuire. Il se contenta de les humilier[1].

De sanglantes représailles ne se firent pas attendre, mais ce n’était que le prélude de la vengeance.

Dans la nuit du 5 août 1689, par une tempête de grêle et de pluie, quatorze cents guerriers traversèrent le lac Saint-Louis et abordèrent sans être aperçus sur la côte de Lachine. Ils n’approchèrent point des forts. Divisés en petits pelotons, ils se répandirent sur un rayon de trois lieues et entourèrent les habitations où les Français reposaient dans une fatale sécurité.

Silencieux comme des ombres, ils attendirent les premières lueurs du jour. Alors, au signal donné, une horrible clameur déchira les airs. Portes et fenêtres volèrent en morceaux et dans toutes les maisons le massacre général commença en même temps.

Les Iroquois se surpassèrent eux-mêmes en cruauté. Ils empalèrent les femmes, mirent les enfants à la broche et les firent rôtir. Ils forcèrent des mères à coucher sur les cendres rouges les pauvres petits qui s’attachaient à elles.

Deux cents personnes périrent dans les flammes. Plus de cent vingt furent solidement garrottées et réservées pour une mort plus lente. Tout fut pillé et brûlé jusqu’aux approches de la ville.

  1. Denonville écrivit au ministre des colonies : « Les Sauvages sont comme une grande quantité de loups répandus dans une vaste forêt, d’où ils ravagent tous les pays environnants. On s’assemble pour leur donner la chasse, on s’informe où est leur retraite et elle est partout. Il faut les attendre à l’affût et on les attend longtemps. On ne peut aller les chercher qu’avec des chiens de chasse et les Sauvages sont les seuls limiers dont on puisse se servir pour cela. Mais ils nous manquent et le peu que nous en avons ne sont pas gens sur lesquels on puisse compter. »