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aidait avec une bonté inlassable, les traitait moins en seigneur qu’en père. Et la sympathie, le respect et les services reçus et rendus formaient entre eux des liens solides que le danger ne tarda point à resserrer. L’ère de paix avait été comme un beau et vigoureux printemps, mais la Nouvelle-France, heureuse, prospère, déjà riche de sève, allait traverser des années terribles et subir des humiliations qu’elle n’avait point connues aux jours de ses pires détresses, à l’âge héroïque et militant.

Les colonies anglaises auraient voulu accaparer le trafic avec les indigènes, et, dans l’intérêt du commerce, Dongan, gouverneur de la Nouvelle-York, poussait les Iroquois aux hostilités. Se sentant soutenus, ces barbares envahirent et ravagèrent le pays des Illinois, alliés des Français, et lâchèrent leurs bandes sur divers points de la Nouvelle-France. Ces insolentes ruptures de la paix appelaient une prompte réparation, mais par l’impéritie absolue du gouverneur, M. de la Barre, l’expédition de 1683 contre les Cinq Cantons n’aboutit qu’à un traité déshonorant qui déconsidérait les Français aux yeux de leurs ennemis et de leurs alliés. L’indignation fut générale ; et le roi rappela promptement la Barre.

Le marquis de Denonville, qui le remplaça, avait du prestige, de la valeur, une grande réputation d’habileté. Son administration fut pourtant encore plus funeste. Il fit saisir les délégués iroquois qu’il avait fait inviter par un missionnaire, le Père de Lamberville, à venir traiter de la paix, et les envoya en France chargés de fers. Cet acte qui déshonora le nom français parmi les indigènes fut hautement blâmé dans le pays. Louis XIV désavoua le gouverneur ; les délégués revinrent. Mais les superbes Iroquois n’oublièrent point l’outrage.

Avec les forces dont il disposait dans l’expédition de 1687,