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PHYSIONOMIES DE SAINTS

malgré la grande réputation de quelques-uns des savants et des orateurs, ce n’est pas à leur plaire que Jean songea, en arrivant dans sa ville métropolitaine.

À peine avait-il pris possession de son siège, qu’il réunit les intendants et les secrétaires du patriarcat.

« — Avant toutes choses, mes frères, leur dit-il, il faut rendre au Christ les services qu’il attend de nous. Allez donc par la cité tout entière, et inscrivez soigneusement les noms de mes seigneurs.

— Quels sont les seigneurs du patriarche d’Alexandrie ? demandèrent les officiers qui ne comprenaient point.

— Ceux que vous appelez pauvres et indigents[1] je les appelle mes seigneurs et mes protecteurs, repartit le saint, car c’est par eux que j’espère conquérir une place au royaume des cieux ».

L’ordre fut exécuté. Les envoyés découvrirent dans Alexandrie sept mille cinq cents indigents, et l’archevêque régla, sur-le-champ, l’aumône qui serait distribuée tous les jours à chacun d’eux.

Il fit construire des hôpitaux pour les malades, des hospices pour les étrangers et les pèlerins, des asiles pour les vieillards et leur assigna des rentes.

Ses officiers, épouvantés de ses libéralités, lui représentaient parfois qu’il fallait ménager les biens de son église.

« Dieu pourvoira aux besoins de mon église, répondait le saint avec calme ».

Les maux extrêmes, amenés par l’invasion des Perses, mirent encore plus en lumière l’héroïsme de sa confiance en Dieu et de sa charité.

Les barbares s’étaient emparés de la Palestine, de la Syrie et des contrées voisines, ils avaient tout mis

  1. Les pauvres sont vos maîtres et les miens, les voiles dessous lesquels se cache Notre-Seigneur Jésus-Christ, disait, mille ans plus tard, Vincent de Paul aux Filles de la Charité. Comme autrefois l’apôtre bien-aimé, dans son extrême vieillesse, ne savait plus dire qu’un mot : Aimez vous les uns les autres, Vincent de Paul, à la fin de sa vie, répétait toujours : Aimez les pauvres, ce sont vos maîtres et les miens.