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Avec quel intérêt Louis Hébert dut suivre l’éclosion du printemps, le renouveau charmant dans la forêt vieille comme le monde. C’est l’âme en fête sans doute que cet agriculteur de race reprit ses travaux, mais d’amères épreuves l’attendaient.

Les marchands de la Compagnie n’avaient point tardé à reconnaître en lui un colon sérieux. Or, ils ne voulaient voir dans le Canada qu’un pays de traite.

D’après Sagard, malgré tous leurs engagements, ils n’avaient pas encore défriché un demi arpent. La courageuse initiative d’Hébert alarma donc leur insatiable cupidité, et notre premier colon se heurta désormais à un mauvais vouloir implacable.

À force d’ennuis, de tracasseries, de vexations, de persécutions mesquines, on espérait le dégoûter, le décourager, le décider à retourner en France. « Ô Dieu ! partout les gros poissons mangent les petits »[1], écrivait le Frère Sagard, indigné de ces injustices.

Mais la fermeté d’Hébert fut inébranlable. Réduit à préparer ses champs à la bêche, il bêcha, il piocha sans regarder à la fatigue, et dans ses sillons péniblement creusés, par un beau jour de mai, il jeta triomphalement la première semence.

  1. Sagard : « Histoire du Canada ».