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la douceur, et son cœur se serrait à la pensée de l’exil éternel.

Longtemps, il suivit du regard la barque qui conduisait Champlain à Tadoussac où l’on prenait les vaisseaux. Une paix, une splendeur divine s’épandait sur le fleuve et sur le sauvage Québec. Les bois encore ruisselants d’écarlate, de pourpre et d’or, baignaient dans la brume lumineuse ; mais la douceur de cette magnificence éphémère le remplissait d’effroi et de tristesse… Il songeait à ce que serait l’hiver dans cet isolement, dans cet immense désert de neige, et sentant le découragement l’envahir, il prit le sentier de la chapelle.

Cette pauvre petite chapelle de bois brut — la première demeure de Notre-Seigneur sur la terre canadienne — qu’elle était chère à notre premier colon ! Que de fois il y vint retremper sa constance !


* * *


La forêt sans fin, à peine envahie, se dépouilla rapidement. Les feuilles mortes roulaient le long du cap, elles s’amoncelaient dans la clairière, et Hébert devait dégager les fenêtres et la porte de sa maison. Bientôt viendrait le froid vif, le froid aigu qui mord et brûle la chair. Courageusement, Hébert se préparait à l’hiver si long, si rigoureux. Les cordes de bois s’allongeaient ; les bûches s’entassaient.