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Une fois sa famille convenablement logée, Louis Hébert prit la hache et, autour de son humble logis, il attaqua la forêt séculaire. Pour ébranler ces grands arbres ridés, moussus, à la puissante ramure chargée de nids, il fallait bien des coups de hache. Les oiseaux s’envolaient au bruit et, ramassant ses forces, Hébert frappait… Les géants centenaires finissaient par tomber… La trouée s’élargissait. Mais les racines, riches de sève, étaient bien dures à extirper. C’est moulu de fatigues, les mains ensanglantées, que Louis Hébert regagnait le soir sa maison. Le reflet de l’âtre à la vitre lui était doux, et la force physique donne de la saveur à la fatigue. Mais chaque matin, il fallait reprendre le rude labeur, il fallait retrouver en soi le même courage…

À l’automne, Champlain devait s’embarquer pour la France. Hébert croyait qu’une protection céleste couvrait l’illustre marin et les périls de la traversée ne l’effrayaient pas. Mais l’approche de ce départ lui donna la nostalgie du pays, et Québec lui devint odieux. Il enviait les oiseaux migrateurs qui s’envolaient en bandes innombrables. Son âme s’en allait toute vers la France. Ce Paris si animé, si brillant, où il avait grandi, où il avait vécu, il l’avait toujours sous les yeux. Ces liens délicats et profonds, qui unissent un être au passé, à la terre qui l’a porté, qui l’a nourri, il en sentait toute la force, toute