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LARMES D’AMOUR

temps à côté du lit où la pauvre enfant était couchée dans cette attitude effrayante qui n’appartient qu’à la mort. La croix noire tranchait lugubrement sur la blancheur du drap qui la couvrait. Je soulevai le linceul et regardai longtemps. Ah ! Francis, serait-il possible de ne nous aimer que pour cette vie qui passe ?

Tout passe et nous passerons comme tout le reste, mais je veux que celui de nous qui survivra à l’autre puisse dire ce qu’Alexandrine de la Ferronnays écrivait après la mort d’Albert : « Ô mon Dieu, souvenez-vous que pas une parole de tendresse n’a été échangée entre nous, sans que votre nom ait été prononcé et votre bénédiction implorée. »




7 septembre.


Hier, nous avons fait une promenade à l’île aux Coudres, excursion que la présence de Francis m’a rendue vraiment délicieuse. Puis, il y a maintenant dans mon âme quelque chose qui donne à la nature une splendeur que je ne lui connaissais pas. Mon Dieu, quel sera donc le ravissement de vous aimer dans votre ciel si beau, puisque, dès cette vie, il y a tant de bonheur à aimer vos créatures !

Au hâvre Jacques-Cartier, nous nous sommes agenouillés à l’endroit où la messe a été dite pour la première fois au Canada. Je ne regardai pas M. Douglas. Il m’était pénible de le voir étranger aux sentiments que ce souvenir réveille.