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Pauvre père, toujours si aimable, encore si brillant. Ce n’est pas lui qui se prêtera aux conversations sur l’au-delà. Il veut réveiller ma vanité, — ce qui n’est pas bien difficile. De mes pauvres triomphes mondains, il m’est revenu tantôt une saveur horriblement douce.


* * *


6 juillet.

Ma mère me reproche de me négliger, de n’avoir plus de goût à rien, c’est un peu bien vrai.

Que j’aille parfois à la messe en semaine, l’inquiète. Elle m’assure qu’il me faut beaucoup de repos, beaucoup de distractions. Comme les autres ici, elle croit que la terrible mort de M. Durville m’a dangereusement impressionnée.

Cette mort m’a fait voir combien fragile est la vie. Mais la crise intérieure l’avait précédée. On n’a pas aperçu le travail secret dans mon âme. C’est bien Benedict Osborne qui m’a porté le grand coup. C’est lui qui a réveillé ma conscience. Le changement qu’on remarque en moi vient surtout de cette souffrance intime qui s’avive au lieu de s’apaiser.

Je n’ai pas à me reprocher ce que le monde appelle de grandes fautes, mais j’ai vécu pour moi-même, pour paraître, pour faire de l’effet au lieu de faire du bien. Je suis un être de luxe, d’égoïsme et d’orgueil.