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L'OBSCURE SOUFFRANCE

plus profond du cœur ! Quelle pénétrante, quelle dangereuse amertume elles répandent sur la vie entière ! On dit que le danger est partout. Soit. Mais les saines joies du cœur ne sont-elles pas un peu comme les feuilles qui purifient l’air de bien des poisons ? Au moins cela me paraît ainsi et je redoute l’avenir qui m’attend.

S’il est des douleurs qui fortifient l’âme, qui l’enrichissent, n’en est-il pas d’autres qui la flétrissent et la dessèchent ? Le vent et l’orage donnent aux plantes plus de force et de vie. Mais qui n’a vu de ces arbres dépouillés, déchiquetés, rongés jusqu’au faîte par les larves ? Douloureuse image qui m’a fait songer plus d’une fois. Pour peu qu’on s’observe, on sent si bien comme les chagrins misérables appauvrissent l’âme, la vulgarisent et la déflorent. C’est triste, mais c’est vrai.


16 mai.



Qui sait, peut-être n’est-ce vrai qu’autant qu’on souffre mal. Et si je suis aussi sensible à mes peines, est-ce bien parce que je les crois