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ÉLISABETH SETON

voyé de la ville notre dîner et un serviteur qui restera avec nous tout le temps de notre quarantaine. C’est un vieillard, Luigi, tout petit, avec des cheveux blancs. Il a des yeux bleus dont le regard passe tour à tour de la gaieté à la tristesse, comme s’il voulait nous plaindre et nous ranimer en même temps. Quand il est entré, j’avais le visage couvert avec un mouchoir, et je n’ai pas seulement levé les yeux, tant j’étais fatiguée de voir tous ces hommes avec leurs chapeaux retroussés, leurs cocardes, leurs baïonnettes, etc. Pauvre Luigi, je me souviendrai longtemps de sa voix pleine de larmes et de tendresse, quand il vit que je refusais de dîner. Il regarda au ciel, en élevant ses mains, dans quelque prière qui demandait à Dieu de me consoler. Vraiment, je serais toute consolée, si je n’avais pas là mon pauvre William. Mais le voir ainsi, en l’état où il est, c’est pire que la mort !

“ On a tiré les verrous d’une autre porte, et l’on a donné à Luigi un logement à part, à côté de nous. Maintenant, qu’il est entré dans notre chambre et qu’il a touché ce que nous avons touché, il est devenu pour eux tous un objet de terreur. Que de fois, dans une seule journée, ce pauvre vieillard monte et redescend nos vingt marches roides, presque perpendiculaires, pour nous procurer ce qui nous est nécessaire, ou pour nous apporter quelque soulagement !


Lundi, 21 novembre.

À mon réveil, même impression de calme et de consolation qu’hier en me mettant au lit, — apporté à William le lait chaud qu’il prend chaque matin — Réfléchi avec lui sur notre situation. Bien qu’elle soit si contraire à ce qu’exigerait son état, commencé à l’envisager comme le premier pas dans la voie où nous veut cette volonté toute-puissante, qui dispose toutes choses pour votre profit. Mis ma petite Anna en train à son travail ; moi-même appli-