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ÉLISABETH SETON

tout souffre en nous, le besoin d’isolement, d’immobilité se fait fortement sentir, et inexprimablement soumise à la volonté divine, la pauvre mère aurait pourtant voulu s’arrêter à la résignation passive.

Elle éprouvait un besoin morbide de se plonger dans sa douleur.

Les relations ordinaires lui étaient devenues un supplice. Et comme son devoir de supérieure l’obligeait à l’action continuelle, ce fut l’occasion d’une lutte incessante, héroïque.

« Je préférerais cent fois prendre le breuvage le plus amer, la médecine la plus rebutante, et, en somme, me soumettre à toute espèce de peines corporelles, plutôt que de dire seulement une parole à une créature vivante,  » écrivait-elle à son directeur, M. Bruté de Rémur.

Elle se reprochait ce qu’elle appelait : son indigne abattement[1].

Dans le cœur profondément aimant d’Élisabeth la douleur de la séparation resta horrible, toute vive. « Ce qui ne se comprend pas, écrivait-elle à une amie, c’est que l’amour d’une mère puisse aller croissant comme fait le mien depuis qu’elle n’est plus. »

Mais, se rappelant qu’elle avait tout offert à Jésus-Christ pour obtenir le don de son amour, elle renouvelait sa généreuse offrande et le conjurait de couper, tailler, retrancher, quelque angoisse qu’elle dût souffrir.

« Laissez saigner ce cœur, disait-elle, laissez-le souffrir, tout souffrir, pourvu seulement, ô mon Seigneur bien-aimé, que vous le formiez pour vous. »

Ô nobles ! ô courageuses prières des saints ! et que l’hé-

  1. M. de Rémur en jugeait autrement : « Il me semble, disait-il, que, dans aucune âme humaine, on n’a jamais trouvé plus d’élévation, de pureté, d’amour pour Dieu, pour le ciel et pour les choses surnaturelles. » Mgr Carroll, qui visita en ce temps-là la communauté de la mère Seton, admira les visibles effets de la direction qu’elle donnait à ses religieuses. L’œuvre ne grandit pas sans rencontrer de redoutables épreuves, mais aucune ne lui vint de l’intérieur.