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faut songer à ceux qui sont plus malheureux que soi. Depuis quelques jours, j’interroge souvent la carte de la Sibérie, et je laisse ma pensée s’en aller vers ces solitudes glacées.

Combien de Polonais coupables d’avoir aimé leur patrie sont là. Et qui dira leurs tristesses ? les tristesses du patriote ! les tristesses de l’exilé ! les tristesses de l’homme au dernier degré de malheur !

Ah ! ces misérables, traités plus mal que des bêtes de somme, ce serait à eux de maudire la vie. Pourtant ils ne le peuvent sans crime et cette existence, dont aucune parole ne saurait dire l’horreur, reste un bienfait immense parce qu’elle peut leur mériter le ciel. Qu’est-ce donc que le ciel !

Mon Dieu ! donnez-moi la foi, la foi à mon bonheur futur ; et ces infortunés ! Seigneur, innocents ou coupables, ne sont-ils pas vos enfants ? Ah ! gardez-les du blasphème, gardez-les du désespoir, ce suprême malheur.

Qu’aucune pensée de haine, qu’aucun doute de votre justice, qu’aucune défiance de votre adorable bonté n’atteigne jamais leurs cœurs. Envoyez la divine espérance !