autres, une grande croix rouge était plantée.
— Voici ce que vous êtes venu chercher au bout du monde, mon cher frère, dit le fondateur de la mission huronne, voici la vigne couverte d’épines que nos mains doivent arracher… voici le champ de bataille où il faut lutter jusqu’à la mort, contre le prince des ténèbres.
Obéissant à un même sentiment, les deux Jésuites s’agenouillèrent et prièrent quelques instants ; puis, se relevant, ils s’étreignirent comme deux guerriers qui se jurent de donner tout leur sang pour la même cause, et se dirigèrent vers l’entrée de la bourgade protégée par une palissade.
Aux alentours, le soleil couchant embrasait les cimes ondoyantes de la forêt.
Tout était fort paisible dans le village.
Des hommes fumaient paresseusement étendus sur l’herbe ; d’autres assis en cercle jouaient aux osselets.
Près du ruisseau qui coulait à travers la bourgade, des femmes sales, hideuses, s’occupaient à faire sécher du poisson.
Les éclats de voix des enfants qui s’exerçaient au tir, en dehors de l’enceinte, troublaient seuls le silence.
Personne ne semblait remarquer le passage des missionnaires.