grande souffrance. Mais il faut attendre les moments de la divine Providence, continua le missionnaire avec résignation. Il faut se contenter de ne rien faire, ayant tout fait… C’est sur ces fondements que Dieu veut élever ces églises naissantes. D’ailleurs, si aride que soit le sol, jamais la semence de vie ne périt tout entière. Nous avons instruit et baptisé à la mort plusieurs adultes, et il meurt bien peu d’enfants sans baptême… Mais il faut essuyer mille mépris, mille outrages et avoir la tête prête à recevoir le coup de hache, plus souvent que tous les jours.
— Ce n’est pas assez, s’écria Charles Garnier, il faut souffrir tout ce que la cruauté sauvage peut inventer de plus terrible.
— C’est beaucoup dire, fit tranquillement le P. de Brébeuf. L’an dernier, on a grandement appréhendé une invasion iroquoise. Nos pauvres Hurons ne savent ni s’organiser, ni se défendre. Aussi chaque jour, nous nous préparions à mourir ou à être traînés en esclavage.
Charles Garnier regardait son supérieur avec un tendre et inexprimable respect.
— Mon Père, dit-il, il y aura des martyrs parmi nous… Ce serait bien une sorte de malédiction pour ce pays s’il n’y en avait pas !
— Le sang des martyrs est une semence de