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ne saurais dire jamais comme le voir me consolait, me fortifiait. On sentait qu’il portait en son cœur de quoi acheter tous les bonheurs de la terre.

Chaque fois qu’il venait, il me priait de chanter.

Il me semblait que je ne le pourrais jamais, mais le désir de lui faire plaisir me donnait du courage.

C’était toujours des chants d’allégresse qu’il me demandait, et souvent il s’y joignait, emporté par la joie qui débordait de son cœur.

Cette joie du sacrifice, cette joie merveilleuse et sacrée, je la sentais m’envelopper, me pénétrer… et comment dire la douceur céleste, le charme divin de ces moments où je ressentais d’une manière si puissante, si intime, cette bienheureuse influence qu’il a toujours exercée sur moi.

Il devait quitter Paris, le 26 mars. La veille, il vint pour la dernière fois ; et, aussi longtemps que je vivrai, j’aurai présents tous les détails de cette heure déchirante.

Dans la nuit, mon oncle était tombé fort malade. Il délirait : et ne reconnut pas son fils dont il parlait sans cesse… qu’il voulait aller arracher aux sauvages.

Charles rassura sa mère que cette fièvre alarmait ; et, l’attirant à lui, dans une fenêtre, lui parla longtemps à voix basse.