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ce qu’on appelle malheur ne mérite pas leurs regrets. Une âme daigne accepter la fortune, le repos, s’il leur faut superposer la vigueur de ses sentiments, l’essor de son génie.

On estime les grands desseins, lorsqu’on se sent capable des grands succès.

La réserve est l’apprentissage des esprits.

On dit des choses solides, lorsqu’on ne cherche pas à en dire d’extraordinaires.

Rien n’est faux qui soit vrai ; rien n’est vrai qui soit faux. Tout est le contraire de songe, de mensonge.

Il ne faut pas croire que ce que la nature a fait aimable soit vicieux. Il n’y a pas de siècle, de peuple qui ait établi des vertus, des vices imaginaires.

On ne peut juger de la beauté de la vie que par celle de la mort.

Un dramaturge peut donner au mot passion une signification d’utilité. Ce n’est plus un dramaturge. Un moraliste donne à n’importe quel mot une signification d’utilité. C’est encore le moraliste !

Qui considère la vie d’un homme y trouve l’histoire du genre. Rien n’a pu le rendre mauvais.

Faut-il que j’écrive en vers pour me séparer des autres hommes ? Que la charité prononce !

Le prétexte de ceux qui font le bonheur des autres est qu’ils veulent leur bien.

La générosité jouit des félicités d’autrui, comme si elle en était responsable.

L ordre domine dans le genre humain. La raison, la vertu n’y sont pas les plus fortes.

Les princes font peu d’ingrats. Ils donnent tout ce qu’ils peuvent.

On peut aimer de tout son cœur ceux en qui on reconnaît de grands défauts. Il y aurait de l’impertinence à croire que l’imperfection a seule le droit de nous plaire. Nos faiblesses nous attachent les uns aux autres autant que pourrait le faire ce qui n’est pas la vertu.

Si nos amis nous rendent des services, nous pensons qu’à titre d’amis ils nous les doivent. Nous ne pensons pas du tout qu’ils nous doivent leur inimitié.

Celui qui serait né pour commander, commanderait jusque sur le trône.

Lorsque les devoirs nous ont épuisés, nous croyons avoir épuisé les devoirs. Nous disons que tout peut remplir le cœur de l’homme.

Tout vit par l’action. De là, communication des êtres, harmonie